J’ai parfois entendu des gens (des gens un peu ignorants d’après moi…) dire des phrases comme : « Le français parlé au Québec n’est pas le vrai français » ou même « L’accent québécois est complètement différent du français. C’est comme une autre langue ». Je trouve des commentaires comme ceux-ci absolument absurdes; ils démontrent plus le manque de connaissance des gens que la vérité.
Je dis cela parce que oui il y a des différences entre les accents, mais lorsqu’on regarde spécifiquement ce qu’il y a de différent, on se rend compte que le clivage entre les deux langues n’est pas si énorme que ce que les gens veulent parfois nous faire croire. Au moins, en entendant des commentaires comme ceux-ci, j’ai appris à rester critique lorsque les autres veulent faire passer leurs jugements en vérités absolues.
Je vais décrire les principales distinctions entre l’accent québécois standard et l’accent français. D’abord, il faut comprendre que je vais parler des différences phonétiques généralisées. Par cela, je veux dire que quelqu’un de Montpellier ou de Gaspé peut avoir des particularités régionales, ce qui peut différencier leur accent d’autres régions.
Il y a aussi des façons de parler plus « populaires » et des expressions que je vais mettre dans des articles ultérieurs (L’accent québécois : le langage populaire).
Ici, je me concentre sur les différences phonétiques qu’on trouve dans presque tous les types de discours au Québec.
Entre l’accent québécois et l’accent français, je trouve que les principales différences se trouvent dans les voyelles nasales, donc je commence par cela :
(Pour mieux comprendre les symboles phonétiques, lisez cet article : L’alphabet phonétique international)
1. Les sons nasaux un peu plus différenciés
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- /ã/ : Pour ce son au Québec, la bouche est un peu plus ouverte, ce qui fait que ce son s’approche du son /Ɛ̃/ en France. En revanche, le son /ã/ en France peut s’approcher du son /ɔ̃/.
- /Ɛ̃/ : Au Québec, ce son est un peu plus exagéré avec la bouche en sourire, ce qui fait que le son peut être mieux représenté par le symbole /ẽ/.
- /ɔ̃/ : En France, la bouche est plus fermée et ronde pour ce son.
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2. L’affrication (ti, tu, di, du) :
Au Québec, les sons /t/ et /d/ sont prononcés avec la langue plus près des dents en avant, près d’où les sons /s/ et /z/ sont faits. Du coup, lorsque /t/ et /d/ sont suivis par les sons /i/ ou /y/ (deux sons en haut et en avant de la bouche), une petite affrication se fait. C’est comme si on ajoutait un petit /s/ (pour /t/) ou /z/ (pour /d/) entre les deux sons. Pour mieux visualiser cet effet, on peut l’écrire avec des lettres comme ceci : tsi, tsu, dzi, dzu. Notez bien que cette particularité de l’accent est moins présente à l’est du Québec (en Gaspésie et dans l’accent acadien des maritimes).
3. Le son /α/ :
Au Québec, on différencie entre les mots la et là. Le son /α/, comme dans là, est fait plus vers l’arrière de la bouche. Le son /a/, comme dans la, est plus en avant. En France, il y a peu de distinction entre les mots tache/tâche, la/là, etc. Mais au Québec, la distinction est assez marquée.
4. Des voyelles relâchées /I/, /ʊ/, /Y/ :
En France, le «i» se prononce /i/. Cependant, au Québec, on entend souvent le son /I/ lorsque le «i» se retrouve entre deux consonnes da la même syllabe. Ce son est un peu plus ouvert, pas si tendu, que le son /i/. Ce son peu également ressembler au son /e/.
Voici quelques exemples de mots où on peut trouver ce son dans l’accent québécois : vite, Martine, type, limite, plastique. On retourne au son /i/ lorsqu’on trouve un des sons suivants /ʁ/, /z/, /v/, /ʒ/ à la fin de la syllabe : vive, pire, expertise, exige.
Le même phénomène se passe avec le son /u/ au Québec. Entre deux consonnes dans une syllabe, le son /u/ devient le son /ʊ/, qui est plus relâché. Voici quelques exemples de mots qui ont ce son : route, coude, choucroute, douche.
Même le son /y/ devient plus lâché dans la même situation que les autres : lune, tuque, études, sur.
Cela fait que le français parlé au Québec semble plus compliqué parce qu’ils ajoutent trois sons de plus qui n’existent même pas dans l’accent de France ! Il y a une autre langue assez connue qui utilise /I/ et /ʊ/ en plus que /i/ et /u/. Cette langue est l’anglais. Si vous connaissez cette langue, vous pouvez reconnaitre ces sons dans les mots sit et could, respectivement.
5. La prononciation de but et août :
Au Québec on prononce but et août, en général, comme /by/ et /u/ (sans t final). En France on peut surtout entendre /byt/ et /ut/.
6. Les voyelles longues
Au Québec (et parfois ailleurs dans la francophonie), il y a certaines voyelles dans certains mots qui sont prononcées d’une façon allongées (le son dure plus longtemps). Cet allongement crée parfois un autre effet, le diphtongaison que je décris dans cet article : L’accent québécois : le langage populaire.
Voici quelques exemples de mots où on peut trouver cet allongement (j’ai mis en gras les voyelles qui sont plus longues) :
- père
- fête
- siège
- neige
- bête
- gaz
- pâte
Je dirais que ce sont les principaux éléments de l’accent québécois standard. Comme on voit, ce n’est pas une grande différence, juste quelques variations des sons, principalement des voyelles.
Si on n’est pas habitué à l’accent (québécois, français ou n’importe quel autre accent), ça peut prendre du temps pour bien ajuster nos oreilles. Mais après, la compréhension se fait assez facilement.
En complément :
Voici un article de Radio-Canada avec une très bonne vidéo qui explique et montre des exemples de l’accent québécois : https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1159373/accent-francais-quebecois-phonetique-vincent-arnaud
Je vous suggère également :
- Un regard sur : Pure laine (série télévisée)
- Un regard sur : Derrière la neige (livre) de Audrey Guiller
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